"Un tournant radical est amorcé. Une renaissance, qu’il faut qualifier de sauvage. L’art en est l’avant courrier¹. » Pour la 16ème édition du festival Cahors Juin jardins, après avoir exploré la Symbiose autour des systèmes d'entraide, nous nous intéressons à la poétique du sauvage, acte 2 de la thématique Symbiose.
Dans le contexte inédit et planétaire que nous subissons
depuis plusieurs mois, une nouvelle représentation du monde émerge dans
laquelle l’art et la nature collaborent en une poétique du sauvage qui sera
en 2021, l’acte 2 d’une réflexion que nous avons amorcée en 2020 autour de la Symbiose (…une renaissance de l’entraide> 15ème édition du
festival Cahors Juin Jardins).
Il n’est pas question d’anticiper un scénario
catastrophe, ni d’afficher une confiance béate dans la prise de conscience
d’une transition globale et généralisée à mettre en oeuvre. Il s’agit plutôt
d’associer l’art et la nature dans une poétique du sauvage pour imaginer le monde
d’après. Cette langue universelle réunit l’art et la nature dans un élan vital
(anima) plaçant l’humain dans le cercle du vivant et dans la « concordanSe »²avec
son environnement. Elle explore et dessine les contours d’une réconciliation symbiotique
de l’homme avec la terre. Nous avons pu observer à l’issue du premier
confinement, que la nature sauvage sortie des bois (chevreuils, sanglier,
adventices, et autres plantes sauvages) s’invitait dans nos espaces humains,
semant beauté et désordre. Et dans l’ivresse du déconfinement, nous nous sommes
questionnés sur comment habiter le monde en limitant notre impact anthropocène
; comment redonner « toute sa place au respect de cette nature indocile »³;
comment déconstruire cette relation déséquilibrée et destructrice que nous
entretenons avec le vivant; comment partager et coexister avec la «
biodiversité qui nous fonde et qui sait, créer de nouvelles formes de
diplomatie avec le sauvage»⁴.
La poétique du sauvage est multiple, évoquant un imaginaire de liberté, de
nature idyllique et sans entrave, autorégulatrice et belle ; un retour aux
sources, une puissance vitale incroyable. Elle convie la pensée sauvage, liant
le cosmos à l’infiniment petit, l’animal⁵ (dont l’humain) au végétal, le
spirituel au biologique. Car ne l’oublions pas, le sauvage se cantonne aux
lisières par peur de se faire domestiquer. Il rappelle la figure du sauvage⁶,
mi-homme mi-végétal, étrange et étranger. Il renvoie à l’inquiétant et
l’indomptable, stigmatisant la violence et l’opposition à l’ordre social. Il se
décline en ensauvagement des masses, traduisant les angoisses d’une société qui
s’interroge sur sa solidité et son avenir. ⁷ Et il est une part de nous,
archaïque, enfouie et désapprise.
La poétique du sauvage est donc un chemin
qu’empruntent l’art et la nature pour raconter, comprendre, traduire le monde.
En 2021, quel que soit le contexte, Juin Jardins invite la poétique du sauvage
à inspirer toutes ses actions et à écrire la 16è édition du festival Cahors
Juin jardins.
¹⁻²Renaissance sauvage, l’art de
l’Anthropocène, Guillaume Logé (avril 2019).
³Sauver le sauvage, Virginie Maris, philosophe de
l’environnement au CNRS de Montpellier
⁴ Les diplomates, cohabiter avec les loups sur
une autre carte du vivant, de Baptiste Morizot
⁵ Croire aux
fauves, Nasstasia martin
⁶ Wilder Mann, Charles Freget - photographies
⁷ Edouard
Trouillez, lexicographe, tribune lemonde.fr, 13 septembre 2020
Références cinéma : L'enfant
sauvage Truffaut ; Grizzli man Herzog ; Into the wild/ sean Penn